Julien Guillard est né au Mans de parents ouvriers et commerçants. « Je n’aimais pas trop l’école, mais en 3ème j’ai fait un stage dans une ferme, et j’ai été orienté en agriculture ». A 15 ans, il commence donc son apprentissage et obtient le BEPA polyculture élevage puis le Bac pro.
« Je suis tombé chez des patrons qui n’avaient aucune conscience du danger des produits phytos : ils ne se protégeaient pas. Pas de côte, jamais de masque ». Il est formé à l’ancienne école « on est des durs, on n’est pas là pour se plaindre, si tu te plains tu es faible. » Pendant deux ans, il fait le jalonnage (marquer les passages de tracteur) et se trouve sous les embruns des pulvérisateurs. « Je me souviens du Gaucho (interdit depuis 2004), il me donnait des migraines et me faisait saigner du nez.»
Julien ne peut pas s’installer par manque de terres et de moyens. Sa rencontre avec Sandrine l’emmène en Alsace où il occupe cinq ans un poste en entretien d’espaces verts et de jardins. « En paysage, c’est très simple, le glyphosate, on l’utilise partout, tout le temps, dans n’importe quelles conditions. J’adorais ça, je le faisais tout le temps ». L’été, le pulvérisateur fuit et Julien se réjouit d’être ainsi rafraîchit « j’étais imbibé de glyphosate ».
Changement de région, Julien et Sandrine passent par Bordeaux puis s’installent définitivement à Nantes en 2007. Julien quitte le milieu agricole en passant son permis poids lourd et devient grutier. Oscar naît en 2012.
A 32 ans débutent des problèmes de santé, mais Julien attend un an avant de consulter. A l’occasion d’une gastro, on lui décèle en réalité un problème cardiaque. Des radios en urgence, puis le diagnostic tombe : lymphome. Sandrine est alors enceinte de 7 mois. Il est pris en charge immédiatement, enchaîne neuf chimios. « Entre mes soins et les premiers jours de Camille, ce fut difficile. Nous avons reçu beaucoup de soutien, de la famille mais aussi des amis. Et dès le début, l’hématologue a fait le lien avec les pesticides. ». Il est déclaré en rémission 6 mois plus tard, en août 2016. En août 2020, il pourra se déclarer guéri.
« Avant, quand je voyais des reportages à la télévision sur les pesticides, je me disais que j’avais de la chance parce que je n’étais pas malade. Malheureusement, 10 ans après le résultat est sans appel ». Julien monte son dossier de reconnaissance en maladie professionnelle seul et obtient gain de cause. Malgré cela, cette reconnaissance « ne me rendra pas le fait que je ne puisse plus avoir d’enfants, que je suis vite fatigué par tout ce que je fais, que j’ai une vilaine cicatrice qui fait mal, et que j’ai peur tout le temps de retomber malade. A 36 ans, ce n’est pas juste. »
Quand il s’est posé la question d’aller plus loin juridiquement, il a pris contact avec Phyto-Victimes et s’est rendu à l’Assemblée Générale de Bretagne en 2017. « Maître Lafforgue m’a dit qu’il défendrai mon dossier. J’étais content car je l’avais vu à la télévision, avec son combat plus large de défense des salariés et de l’environnement ». Il est en cours de procédure actuellement pour faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur.
Adhérent de Phyto-Victimes depuis 2017, son engagement est soutenu par Sandrine et ses enfants « sans leur consentement, leur soutien, je ne m’investirais pas autant. Oscar m’a déjà accompagné à des conférences et interventions, il comprend, sait de quoi il en retourne ».
Au sein de l’association, Julien a en effet souhaité intervenir surtout auprès des lycées agricoles « pour leur dire de faire attention. Moi, on ne m’a jamais expliqué que c’était dangereux les pesticides. Ou si on l’a fait, je n’en ai pas souvenir, donc c’est que ça n’a pas marché ». C’est une de ses missions aujourd’hui, en plus d’être relais local Pays de la Loire et administrateur de Phyto-Victimes depuis l’Assemblée Générale 2019.
Il encourage aujourd’hui les adhérentes et adhérents à prendre leur place à Phyto-Victimes.
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